Par Kiki Kienge
« Qu’on le veuille ou pas, de gré ou de force, les eaux du Congo seront transférées vers le Tchad ».
Avait déclaré le feu Idriss Déby Itno, ex-président du Tchad comme déclaration de guerre à la RD Congo, après la déclaration à l’Assemblée Nationale de la RD Congo du ministre de l’Environnement et du développement durable, Amy Ambatobe sur le refus de la RD Congo du Projet Transaqua.
« Tout Congolais conscient de Brazza ou Kinshasa, par ses moyens a le droit de conscientiser et éduquer les enfants de nos pays, mais surtout de les préparer à affronter dans le futur, cette guerre des eaux qui guette désormais nos pays et notre avenir. » Kiki Kienge
C’est un projet dont beaucoup de Congolais et même africains ne sont pas a connaissance, par ignorance ou manque d’informations, mais dont une élite dirigeante des pays concernés tentent de distraire leur population pour leurs intérêts personnels et des pays comme l’Italie, la Chine, la France et des institutions mondiales approuvent et financent.
Il serait temps à tout africain et surtout le peuple congolais, de prendre conscience de ce risque écologique et de possibles instabilités politiques en Afrique, qui risquent de déboucher à des guerres entre États pour la lutte de l’eau.
Mais plus encore, cherchant à « résoudre » le problème du dessèchement du bassin du lac Tchad par le méga-projet Projet Transaqua, nous risquons de détruire les bassins du Congo, deuxième et bientôt premier poumon de la planète.
Qu’on ne nous trompe pas, ce projet n’est ni humanitaire, ni social d’entraide africain comme le prétendent les pays et dirigeants initiateurs, mais un projet économique et financier de plus ou moins 14 milliards $US dont les populations congolaises et des pays du lac Tchad ne gagneront que poussière et larmes de leurs yeux.
LE BASSIN DU LAC TCHAD
Le bassin du lac Tchad, est une zone géographique endoréique centrée sur le lac Tchad, d’une superficie qui couvre presque 8 % du continent africain, avec une population de plus de 30 millions d’habitants, Le bassin du lac Tchad est régulièrement soumis à des mouvements de migration de sa population sous la pression climatique et d’insécurité causées par des groupes armés Djihadistes.
La surface du bassin du lac Tchad, couvre plusieurs parties des pays comme du Tchad d’où il tire son nom, la moitié orientale du Niger, une partie de l’Algérie, une partie de la Libye, une partie du Soudan, une partie de la République Centrafricaine, une partie du Cameroun et notamment une partie du Nigeria.
En 40 ans, le lac Tchad a perdu presque 90% de sa superficie, une conséquence du changement climatique.
Sa population d’environ 30 millions d’habitants en 2019, selon des études en 2021, ont démontré que plus ou moins 5,1 millions de personnes y souffrent de la famine et 400 000 enfants de malnutrition sévère.
Une situation de crise alimentaire qui n’est nécessairement pas liée seulement à la sécheresse causée par le changement climatique, comme le prétend les partisans du Projet Transaqua, mais plus aux groupes armés et aux attaques des djihadistes dans la région.
Mais surtout a une très mauvaise gestion des ressources hydrauliques des pays du bassin du lac Tchad depuis des décennies, dont les dirigeants se sont plus préoccupés de comment se maintenir au pouvoir, que ça gérer leur pays et leurs ressources au profit de la population et des futures générations.
HISTORIQUE DU PROJET TRANSAQUA
Suite de la grave sécheresse qu’affrontait le Sahel africain dans les années 1970, qui avait fait passer la superficie du lac Tchad de 22 000 Km2 à environ seulement quelque 8 000 Km2, réduisant ainsi d’au moins 90% la superficie du bassin du lac Tchad. Mais au même moment la zone de la forêt tropicale humide de l’Afrique, et notamment dans le bassin versant du Congo, enregistrait des augmentations phénoménales de précipitation d’eau, les scientifiques Soviétiques avaient déjà soulevé l’idée d’un projet similaire au Projet Transaqua.
En 1972, l’italien Francesco Curato, chef de BONIFICA S.p.A., réalisa le premier dossier du projet Transaqua, puis en 1982, Marcello Vichi avec l’autorisation de son chef, Renzo Rosi qui avait pris la place de Francesco Curato, conçut un document sur les études et le conseil des agences internationales.
Dans les années 1982, le cabinet d’ingénierie et de conseil italien, BONIFICA qui étudie les défis techniques et financiers, dans le but d’influer sur les participants au sommet de Rio de Janeiro sur le Projet Transaqua.
PROJET TRANSAQUA
Le Projet Transaqua consiste dans la réalisation d’un canal de transfert d’eau inter-bassins au départ de certains affluents du fleuve Congo vers le lac Tchad , d’au moins 2.600 Km, qui utiliserait la vallée du fleuve Chari, principal tributaire du lac Tchad.
La technique est de barrer les cours de plusieurs rivières affluentes du fleuve Congo du nord-est de la République démocratique du Congo (ex-Zaïre), comme l’Oubangui, de l’Aruwimi, du Lindi et du Lowa, au moyen de barrages de régulation, et de soustraire une partie de leurs débits par un canal afin de conduire ces eaux vers le lac Tchad.
On parle d’un volume de prélèvement d’eau du fleuve Congo, de plus ou moins de l’ordre de 100 milliards de M³ d’eau annuellement, c’est-à-dire plus ou moins 3.150 M³/s, une quantité supérieure à la moitié du volume d’eau produit naturellement chaque année dans toute la France métropolitaine et deux fois le débit annuel du Nil au Caire.
En réalité le but principal du Projet Transaqua, est plus économique et financier qu’humanitaire ;
- Primo, il s’agit de permettre l’irrigation de surfaces encore plus vastes qu’avant le début de la sécheresse à fin des années 1960, pour irriguer environ six à sept millions d’hectares dans la région du bassin du lac Tchad.
- Secundo, avec la construction du canal, permettre la création d’une importante production d’énergie électrique par des barrages hydroélectriques, qui doivent produire au moins de 30 à 35 milliards de kilowattheures par an pour la consommation des pays du bassin du lac Tchad.
- Terzio, créerait notamment une importante voie navigation qui doit relier le bassin du lac Tchad avec le réseau du fleuve Congo et, ultérieurement, ainsi créant une liaison avec l’Afrique de l’est.
On parle d’un investissement d’au moins 14 milliards $US, qui seront financés par les États tels que l’Italie, la Chine, la France, des institutions des Nations unies et des organismes privées.
Pour l’étude de faisabilité de faisabilité, le Nigeria avait décidé de financer avec une somme de 5 millions $Us, le Cameroun, la République centrafricaine, le Niger et le Tchad devraient ajouter 1 million $US pur faire un total de 6 millions $US.
POSITION DE LA RD CONGO
Afin de convaincre la République démocratique du Congo d’accepter le projet de détournement de ses eaux vers le bassin du lac Tchad, en 2005 un accord avait été signé par les présidents Joseph Kabila (pour la RDC), Idriss Déby (pour le Tchad) et François Bozizé (pour la Centrafrique).
Mais après plusieurs réunions des pays du bassin du lac Tchad, des pays comme la France, l’Italie et la Chine et des organismes comme l’UNESCO, où la RD Congo n’a était invitée, ni même informée des comptes rendus des rencontres, le pays de Lumumba en 2018 changea de position pour rejeter le projet Transaqua, le gouvernement congolais demanda même au parlement afin que la décision sur le projet de détournement de ses eaux, passe par un référendum populaire.
Comme pour dire, le voisin décide de prendre en mariage votre fille, sans même vous donner la dot, ni même vous informer de qui est le marié, ni vous inviter à la cérémonie, mais ne vous oblige à payer la facture de la fête du mariage.
Toutes les tendances politiques du pays en 2018 étaient d’accord sur le rejet du projet Transaqua et du risque pour la stabilité de la RD Congo, du député Patrick Kakwata alors de la majorité présidentielle au leader de l’opposition et candidat à la présidentielle, Félix Tshisekedi.
« Allez-y comprendre quelque chose. Mais il y a aussi les propos du président tchadien qui a dit que si le Congo ne veut pas nous donner de l’eau, nous allons la prendre par force. » Eve Bazaiba, députée congolaise en son temps, secrétaire de la commission ad hoc qui chargée du projet Transaqua et actuelle ministre de l’environnement RD Congo, qui avait exigé notamment la clarté au gouvernement sur ce qui aurait été conclu comme accord entre la RDC et le Tchad.
OPPOSITION AU PROJET TRANSAQUA
Sinaseli Tshibwabwa, chercheur congolais expert en biodiversité des poissons d’eau douce d’Afrique et écotechnologie des eaux continentales, avait conclu que si le projet Transaqua est exécuté dans les conditions actuelles, les conséquences économiques, écologiques et même sociales seront particulièrement néfastes à la RD Congo.
L’ex-candidat à la présidence française, Jacques Cheminade est proposé un prélèvement de 50 milliards de m³ d’eau du fleuve Congo. Avec un tel prélèvement en amont, le barrage électrique d’IINGA, près de l’embouchure du fleuve Congo, et qui constitue la principale source d’électricité du pays, n’aura plus assez d’eau pour alimenter ses turbines.
Avec la réalisation du projet Transaqua, le trafic fluvial entre les villes de Kinshasa et de Kisangani en passant par le grand Équateur, sera durement affecté par le manque d’eau dans le lit du fleuve.
La pêche, la faune sources de revenus et qui nourrit des dizaines de millions de Congolais, seront notamment affectées au risque de mettre en conflit des communautés vivant aux abords du fleuve et dans les forêts pour se disputer le peu de ressources qui seront à leur disponibilité. La RDC craint les conséquences environnementales d’un tel projet, qui priverait le fleuve Congo d’un partie de son approvisionnement en eau.
Mais les fauves du méga-projet Transaqua ne semblent avoir dit leur dernier mot, par la corruption des autorités congolaises, finançant des groupes armés, créant ainsi la déstabilisation de la Rd Congo, ils ne jurent que sur l’importation forcée ou pas des eaux du Congo vers le bassin du lac Tchad.
Mais devons-nous soi-disant pour tenter de sauver le bassin du lac Tchad par des théories à risques et pas prouver scientifiquement, pour détruire le deuxième, bientôt premier suite à la déforestation de l’Amazonie, poumon de la planète terre pour des intérêts économiques et financiers de quelques individus ?
Des chercheurs proposent, par exemple, un prélèvement des eaux du fleuve Congo en aval du barrage d’IINGA, entre Boma et Banana, pour éviter l’étiage en amont.
le pays de Nelson Mandela, l’Afrique du Sud préoccupé par le manque d’eau, est très intéressé à un projet d’importation des eaux de la RD Congo à partir du grand Katanga.
La guerre des eaux serait-elle déjà aux portes de la Rd Congo ?