Par Kiki Kienge
Ils se nomment : Joseph Adipanga, Pierre Alomon, Jean Balamba, Paul Bayon, Antoine Boïmbo, Edouard Bolia, Camille Bolofo, Antoine Bomjo, Eugène Bonkakou, Pius Bouclou, Léon De Cassa, Joseph Droeven, Honoré Fataki, Jean Jacob Ilanga, Jean-Baptiste Jessy, Albert Kudjabo, Honoré Kulu, Simon Lisasi, Michel Longo, Joseph Lopiko, François Mabilla, Antoine Manglunki, Pierre M’Bimba, Jacques M’Bondo, Jules Moké, Antoine Mona, Paul Panda Farnana, Pierre Sangwali, Thomas Seres, Sébastien Simba, Pierre Soumbou, Antoine Yoka.
Contrairement à la Grande-Bretagne et la France qui eux avaient engagé officiellement des militaires de leurs colonies dans la Première Guerre mondiale, l’exemple des tirailleurs de l’Afrique du Nord et de l’Ouest (Sénégalais), les Spahis du Maroc, les Zouaves, les Sikhs d’Inde, des soldats du Canada, d’Australie, de Nouvelle-Zélande et autres. Le royaume de Belgique avait refusé d’envoyer ses soldats de la Force Publique (FP) sur les fronts en Europe, notamment celui de l’Yser en Belgique.
Pierre Orts en 1916, un des conseillers du ministre Belge des colonies du royaume de Belgique, Jules Renkin, avait proposé à ce dernier d’envoyer des soldats de la Force Publique Congolaise sur le front de l’Yser comme le font leurs alliés Français et Britanniques. Étant donné que la force Publique avec ses plus de 18.000 soldats, sont une des plus Grandes « armées » de l’Afrique et ses soldats disposaient déjà d’une expertise que les autres colonies. Jules Renkin rejettera la proposition avec cette excuse :
« (…) personnellement, je ne suis pas favorable à l’engagement de troupes coloniales hors de l’Afrique. La colonie a déjà consenti de grands sacrifices pour cette guerre. Ensuite, je répugne à l’idée d’entraîner nos Noirs dans des combats entre Européens. Ce n’est pas bon pour leur civilisation ni pour le prestige de la race blanche en Afrique. Il y va même de notre obligation morale de ne pas associer à cette mêlée infernale les peuples que nous avons la charge de protéger. Enfin, je partage l’opinion du gouverneur général, M. Henry, concernant le retour au pays de tous ces Noirs qui seraient venus combattre sur les fronts européens et asiatiques ».
Mais en réalité, le motif Jules Renkin était plus d’ordre « moral » de complexe de supériorité du colon vis-à-vis des indigènes Congolais. Voir combattre côte à côte un soldat blanc et un noir colonisé, diminuerait la peur ou le complexe d’infériorité de l’Africain inférieur envers l’homme blanc supérieur. Pour ne pas parler des relations intimes entre le soldat noir et les femmes blanches qui pouvaient découler de cette promiscuité. Donc officiellement, la Belgique n’a pas engagé des tirailleurs Congolais en Europe durant la Première Guerre mondiale.
Comment se sont-ils retrouvés au front en Europe ?
La grande majorité d’entre eux est arrivée en Belgique, soit embarqués comme matelots à bord d’un navire de la Compagnie maritime Belge, soit comme domestiques (employés ou Boy) d’une famille des colons blancs.
Nombreux d’entre eux se sont retrouvés dans le quartier Saint-Géry, où la présence d’un homme noir libre était au moins toléré. Là ils pouvaient travailler comme vendre dans les marchés Bruxellois des bonbons « Carabouyas », torse nu et chantant en Bruxellois :
« Carabouya, carabouya. Bolle vi de valling. Bolle vi den oest. Alleman moo leive. Wit en zwet. Carabouya ! » Traduction française ; (Carabouya, carabouya. Bonbons pour le rhume. Bonbons pour la toux. Tout le monde doit vivre. Blanc et noir. Carabouya !)
Contrairement aux autres, Paul Panda Farnana M’fumu né en 1888 à Nzemba près de Banana, eurent la chance d’être instruit après son arrivée en Europe. Boy (domestique) de Jules Derscheid, ce dernier confia Paul Panda à sa sœur, Louise Derscheid. Qui lui apprendra le dessin et la musique et l’inscrira à l’athénée royal d’Ixelles, puis à l’école d’horticulture de Vilvorde. Joseph Droeven eut aussi de la chance, car grandit dans la prospérité.
Petite Histoire de Panda Farnana :
« il fut le premier Congolais à avoir fait des études supérieures en Belgique et en France. Il a été surtout le premier nationaliste congolais dénonçant avec virulence les méthodes coloniales mises en place par les Belges. Il réclamait par exemple, la généralisation de l’enseignement laïc ainsi que l’accès des Congolais aux universités de la Métropole. Il plaidait également pour la participation de ses compatriotes au sein des instances décisionnelles de la colonie ainsi que pour l’africanisation des cadres. Il fut, par ailleurs, militant actif du panafricanisme et collabora avec Paul Otlet, Henri La Fontaine (collaborateur de Otlet et Prix Nobel de la paix en 1913), W.E.B. DuBois, et Blaise Diagne à l’organisation du Deuxième Congrès Panafricain, au Palais Mondial, à Bruxelles en septembre 1921. Il s’imprégna des idéaux internationalistes et pacifistes qui étaient ceux de Paul Otlet et Henri La Fontaine. » Source Wiki.
Les tirailleurs Congolais, volontaires ou contraints de faire la guerre en Belgique ?
Avec le début de la Première Guerre mondiale en Europe ses derniers souvent ayant des conditions de vie très précaires, ont voulu améliorer leurs conditions de vie en s’enrôlant comme volontaires dans l’armée Belge.
– François Mabilla signe au 9e régiment de ligne.
– Antoine Manglunki rejoint la 15e batterie de siège à Anvers le 4 août 1914.
– Paul Bayon marié avec un bébé Élisabeth, rejoint les régiments d’artillerie défendant la place de Namur.
– Honoré Fataki boy du lieutenant Orquevaux, s’engagea le 1er août 1914.
– Antoine Boïmbo, Pierre M’Bimba, Thomas Seres, Honoré Kulu et Jean Jacob Ilanga décidèrent de rejoindre l’armée Belge dès la déclaration de la guerre.
Une grande partie des tirailleurs Congolais sans une bonne formation militaire, finissent directement dans les unités de combat, d’autres dans des camps d’entraînement notamment dans le nord de la France.
Quatre Congolais ont défendu le siège de Namur : Paul Panda Farnana et Albert Kudjabo dans le corps des volontaires congolais.
Léon De Cassa a servi lui dans le 8e régiment de ligne, mais il reussi a fuir en France.
Paul Bayon fut au fort de Saint-Héribert.
Farnana et Kudjabo sont faits prisonniers et envoyés dans les camps de prisonniers en Allemagne.
Pierre M’Bimba, le 28 septembre défendit Anvers sous les bombardements de l’armée Allemande.
Antoine Yoka était a combattre au fort de Walem.
Antoine Mona a défendu le fort de Wavre-Sainte-Catherine.
Antoine Manglunki défendait Anvers depuis le fort de Merksem.
Bouclou, avec sa 2e compagnie de pionniers du 3e régiment du génie, construit des ponts pour l’armée.
Sébastien Simba rejoint le 2e régiment des guides à Anvers, du 10 octobre il participera à la retraite de l’armée belge en direction de l’Yser. Dans l’assaut de Tervaete (la bataille de l’Yser) participa notamment Kulu, Soumbou et Joseph Droeven qui s’enfuit en France pour ne pas rejoindre le front.
Bonkakou fût atteint d’une balle, ses camarades le laissent pour mort. Il gît inconscient pendant des heures dans une flaque d’eau. Il sera sauvé par des gendarmes du poste de Pervyse-Ramskapelle qui le ramèneront à hôpital à Calais.
Camille Bolofo fût accusé de s’être infligé une blessure pour ne pas aller au front. Il sera envoyé en congé sans solde. Deux ans plus tard, peu de temps avant la fin de la guerre, il est renvoyé de l’armée.
François Mabilla affrontant à la baïonnette au canon les Allemands, lui fût atteint d’un éclat d’obus à la tête et mourut sur le champ de bataille.
Jean-Baptiste Jessy, victime de l’explosion d’une grenade, est mort au front.
Le sergent Mona fût aussi blessé à Moorslede.
Jules Moké a été atteint de deux balles dans la nuque et d’une troisième dans le thorax, a été transféré à l’hôpital de Paris vivant.
Honoré Fataki a souffert des maladies pulmonaires suite aux respirations des gaz asphyxiants au cours d’une bataille à Zomergem.
Antoine Manglunki s’est marié avec Julia Caron, une Française de Calais.
Albert Kudjabo après la guerre, ira vivre à Liège.
Cherchant à améliorer leur vie dans l’armée, les tirailleurs Congolais sont sorti de la guerre mondiale en Europe encore plus pauvres et en mauvaise santé. Bien sûr pour ceux qui sont resté vivant.
Source Wiki, Cairn.