Par Kiki Kienge
C’est un Denis Mukwege radicalement opposé à la décision du chef de l’État Félix Tshisekedi, d’avoir accepté l’arrivée des troupes armées étrangères formées des militaires des pays de l’EAC sur le sol Congolais ;
« La diplomatie régionale du Président de la RDC nous mène objectivement vers une prolongation et une aggravation de l’instabilité. »
Pour le prix Nobel 2018, la situation sécuritaire déjà fragile et volatile de la RDC, l’arrivée des armées étrangères ne fera qu’empirer une situation de l’est du pays qui se détériore déjà de jour en jour, surtout menacerait la souveraineté du Congo ;
« La Nation est en péril. Notre pays fait l’objet pour la énième fois d’une guerre d’agression par procuration, menaçant la souveraineté nationale et l’intégrité de notre territoire (…) Ainsi, alors que se superpose déjà de manière difficile et peu efficace un partenariat multilatéral avec les Nations Unies et un accord bilatéral entre la RD Congo et l’Ouganda, la récente mission de reconnaissance d’une délégation des officiers militaires des pays membres de la Communauté des États de l’Afrique de l’Est en Ituri et au Nord Kivu annonçant le déploiement imminent d’une Force régionale ressemble à une chronique d’un chaos annoncé, d’autant plus que certains de ces États sont à la base de la déstabilisation, des cycles de violence et du pillage des ressources naturelles de l’Est du Congo. »
Le prix Nobel remet en question cet accord de l’EAC en posant ses questions :
- Quelles seront les règles d’engagement de la nouvelle Force régionale ?
- Quel est son mandat, les objectifs de la mission et sa durée ?
- Comment harmoniser et coordonner les interventions sur le terrain entre les FARDC et ses partenaires onusiens, ougandais, et de la Force régionale ?
- Qui décidera de quoi ?
- sera responsable politiquement et juridiquement ?
Des questions auxquelles la feuille de route publiée après la réunion des chefs d’État à Nairobi n’a su donner plus d’éclaircissement, sinon quelques réponses opaques et peu transparentes.
Denis Mukwege fustige notamment l’intervention de l’armée Ougandaise sur le sol Congolais afin de traquer les rebelles ougandais ADF, une autorisation accordée par le gouvernement Congolais sans même passer par le parlement, qui selon lui est un accord commercial plus que sécuritaire ;
« L’accord de défense et de sécurité entre la RDC et l’Ouganda a été signé fin 2021 et les opérations conjointes ont été prolongées le 1er juin 2022 pour démanteler les rebelles du groupe Forces démocratiques alliées (ADF). Dans un rapport récent publié par le Groupe d’Etudes sur le Congo avec son partenaire de recherche Ebuteli, il y aurait entre 2000 et 4000 militaires ougandais sur le sol congolais et les résultats de leur intervention sont mitigés. Le nombre de victimes civiles est croissant et le rapport met en lumière qu’outre la traque des ADF, qui est loin d’être achevée, des intérêts économiques, commerciaux et géopolitiques expliquent en grande partie l’intervention de l’armée ougandaise à l’Est du Congo. »
La solution selon Mukwege pour mettre fin à l’instabilité à l’Est du pays serait, une réforme profonde des FARDC, partenariat multilatéral des troupes de la MONUSCO avec l’armée Congolaise et surtout le financement des FARDC afin d’avoir une armée professionnelle capable d’affronter tout éventualité sur le front.
Toujours plus sceptique comme d’habitude dans la bonne foi des autorités Congolaise, Denis Mukwege conclut sa déclaration par ses phrases :
« Encore faut-il que nos dirigeants aient la volonté politique et le leadership nécessaire pour revoir la diplomatie régionale en cours et faire avancer sans plus tarder la réforme du secteur de la sécurité en allouant les ressources financières nécessaires pour que le pays se dote d’une armée professionnelle, opérationnelle et responsable capable de défendre l’intégrité de notre territoire et assurer la sécurité de notre population. »